Interview
Metz. Michel Onfray, Lumena : «Le modèle du start-up studio se doit d’être mieux connu»
Seule start-up studio du Grand Est, Lumena réunit entrepreneurs, investisseurs et partenaires avec l'objectif de placer la Lorraine et le Luxembourg sur la carte européenne de la DeepTech. Rencontre avec son directeur général, Michel Onfray.
Comment et pourquoi avez-vous lancé Lumena ?
MO. Pendant dix-sept ans, j’ai accompagné des porteurs de projet au sein de la CCI de la Moselle, de l’idée jusqu’à la création d’entreprise. En 2019, j’ai décidé de poursuivre cette mission en indépendant. Avec mes partenaires chefs d’entreprise, nous avons réfléchi à comment industrialiser la création de ces entreprises à fort potentiel. J’ai alors regardé du côté des start-up studios, tels qu’on les connaît aux États-Unis, sortes d’«usines à entreprises» où les idées internes sont développées grâce à des ressources pluridisciplinaires.
C’est cette philosophie que nous avons importée : Lumena est une initiative entièrement privée, regroupant entrepreneurs, associés et investisseurs, unissant intelligence entrepreneuriale, expertise technologique et solidarité économique. Le nom Lumena symbolise notre rayonnement territorial : LUxembourg, MEtz, NAncy. Une dimension transfrontalière essentielle à notre modèle.
Comment procédez-vous pour lancer une start-up DeepTech au sein du studio ?
Nous partons du principe que les bonnes idées et les ressources financières ne coïncident pas toujours : certaines personnes ont une vision très fine, mais pas les moyens, et d’autres disposent du capital mais pas de l’idée. Chez Lumena, nous développons d’abord des idées internes, que nous confrontons au marché. Si le cas d’usage est solide et qu’une technologie DeepTech (intelligence artificielle, blockchain, IoT, informatique quantique…) peut répondre à un problème réel, nous structurons une équipe dédiée. Nous fournissons un financement interne, des infrastructures partagées, et nous entrons au capital comme actionnaire minoritaire.
Notre équipe pluridisciplinaire - ingénierie, data science, développement commercial, marketing, ressources humaines - est clé : elle permet d’institutionnaliser la création d’entreprise.
Combien de start-up avez-vous créées à ce jour, et dans quels domaines technologiques ?
Nous avons déjà lancé cinq start-up, toutes alignées sur des problématiques DeepTech.
Delmonicos utilise la blockchain pour sécuriser l’identification et le paiement sur les bornes de recharge de véhicules électriques.
Yuzu est une plateforme RH qui évalue les compétences comportementales (soft skills) grâce à un jeu vidéo combiné à des neurosciences. SNCF, La Poste, Burger King ou encore Métro l’utilisent déjà…
Créé en collaboration avec un family office luxembourgeois [structure dédiée à la gestion patrimoniale des familles fortunées, NDLR], Jared est un assistant financier alimenté par l’intelligence artificielle, qui analyse la situation patrimoniale des utilisateurs et les connecte avec des experts.
Justisy (Plaider.fr) est une application agentique qui simplifie les démarches de toute personne qui ne sait pas comment faire valoir ses droits en cas de litige. Il suffit d’y décrire son problème en langage naturel et un agent IA rédige un courrier en bonne et due forme qu’un avocat partenaire peut signer si le préjudice est supérieur à une certaine somme.
Enfin, BlackTicket est une billetterie infalsifiable, basée sur la technologie blockchain. Il s’agit d’un cas particulier puisque nous avons repéré leurs fondateurs à l’occasion d’un hackathon et avons décidé de faire de leur projet, une entreprise que nous avons créée ensemble.
Vous organisez le 27 novembre votre second Lumena Day. Quel est son objectif ?
Le Lumena Day vise avant tout à rassembler nos associés, fondateurs, partenaires et les institutions du Sillon Lorrain pour partager notre nouvelle phase de croissance car nous venons de finaliser une nouvelle levée de fonds et une dizaine d’entrepreneurs du territoire nous ont rejoints cette année.
Nous présenterons également nos deux nouveaux projets : Dona, l’assistanat de direction mutualisé augmenté, et Minrond, à la croisée de la santé, de la donnée et de l’intelligence artificielle.
Enfin, ce rendez-vous est l’occasion de sensibiliser les entrepreneurs locaux au fait qu’ils peuvent investir dans des innovations issues de leur propre territoire, un aspect encore peu connu mais essentiel à la dynamique que nous voulons impulser et auquel nous croyons.