Sauvegarder l'article
Identifiez vous, pour sauvegarder ce article et le consulter plus tard !

RH

Salaires des cadres : des marges en recul

Après deux années de forte inflation, le Baromètre 2025 de l’Apec dresse un tableau contrasté des rémunérations cadres. L’association observe ainsi, d’une part, un ralentissement des marges de manœuvre salariales à court terme, et d’autre part, des inégalités qui perdurent entre hommes et femmes et selon les secteurs d’activité.


© Adobe Stock
© Adobe Stock

Le Baromètre 2025 publié par l’Apec* confirme que les rémunérations cadres continuent d’augmenter, mais dans un contexte nettement moins dynamique que celui des années précédentes. Alors que la forte inflation de 2022 et 2023 avait poussé nombre d’entreprises à revaloriser les salaires pour préserver l’attractivité de leurs emplois, 2025 marque un tournant : moins de cadres ont été augmentés –53 %, soit une baisse de sept points par rapport à 2024–, même si les niveaux de rémunération progressent encore. Huit cadres sur 10 gagneraient entre 38 et 95 k€, avec une médiane à 55 k€ annuels bruts, en hausse de +1,8 % sur un an, un rythme nettement inférieur aux deux années précédentes. « On constate un ralentissement de l’augmentation médiane », observe Hélène Garner, directrice des données et des études de l’Association pour l’emploi des cadres. Cette progression en trompe-l’œil s’explique en partie par la prudence accrue des entreprises. Les politiques salariales se resserrent et s’orientent davantage vers la fidélisation ciblée que vers des revalorisations générales.

Femmes et seniors les moins augmentés

Cette inflexion concerne toutes les tranches d’âge et pratiquement tous les métiers. Les jeunes restent néanmoins les mieux lotis : 66 % des cadres de moins de 30 ans ont été augmentés, un niveau comparable à celui observé avant 2024. « Traditionnellement, les jeunes sont plus augmentés car ce sont les plus mobiles », explique Laetitia Niaudeau, directrice générale adjointe de l'Apec. À l’autre extrémité de la carrière, seuls 42 % des cadres de 50 ans et plus ont obtenu une hausse de salaire. Leur rémunération progresse toutefois davantage que les années précédentes pour atteindre 62 k€, un montant supérieur de 3,3 % à celui de 2024, ce qui traduit un repositionnement de certaines grilles internes.

L’étude met également en lumière une accélération des inégalités salariales entre femmes et hommes. « L’écart commence dès le début de la carrière (il est de 2% pour les moins de 35 ans) et ne fait que s’accroître au fil de la carrière », explique Hélène Garner. Autre déséquilibre mis en avant , l’écart à poste et profil comparables : il reste quasi stable à 6,8 % (à titre de comparaison, il était de 6,9% en 2024 et de 7,1% en 2019). En 2025, la rémunération médiane des hommes dépasse celle des femmes de 16 %, contre 12 % un an plus tôt. Preuve que les progrès enregistrés ces dernières années marquent le pas. « C’est trop peu et trop lent », commente Gilles Gateau, directeur général de l’Apec. S’il estime que l’index de l’égalité professionnelle, mis en place en 2018, « n’a pas produit de résultats chez les cadres », il compte sur la directive sur la transparence salariale pour changer les choses. « Elle vise à rendre visible ces écarts, dès 5 % de différence. L’objectif est d’avancer vers la fin de ces inégalités », plaide-t-il.

Les femmes sont ainsi moins souvent augmentées que les hommes (51 % contre 53 %), moins fréquemment éligibles à une part variable (45 % des femmes en perçoivent une, vs 54 % des hommes, et dans des proportions plus faibles), mais également moins présentes dans les fonctions les mieux rémunérées.

Industrie et Île-de-France, toujours en tête

Les écarts sectoriels et territoriaux restent marqués. L’industrie continue d’offrir les rémunérations les plus élevées, avec une médiane de 61 k€, ainsi que la plus forte proportion de cadres augmentés (65 %). À l’inverse, les services présentent des dynamiques salariales plus contrastées. Du côté des territoires, l’Île-de-France demeure en tête, avec un salaire médian de 60 k€, soit un écart de 15 % avec la province. La région Auvergne-Rhône-Alpes se démarque par la plus forte proportion de cadres augmentés (55 %), quand d’autres régions accusent une baisse par rapport à 2024.

La taille de l’entreprise joue également un rôle déterminant. Les grandes entreprises disposent de marges plus importantes : 62 % de leurs cadres ont été augmentés, contre 52 % dans les PME et 43 % dans les TPE. Les rémunérations médianes suivent la même logique, les entreprises de plus de 5 000 salariés affichant systématiquement les montants les plus élevés.

Autre paramètre à prendre en compte, la rémunération variable, qui demeure un élément structurant de la politique salariale des entreprises : un cadre sur deux en perçoit une. Le montant moyen atteint 9 000 €, soit 11,2 % de la rémunération totale des cadres concernés, un niveau quasi stable depuis plusieurs années. Sa diffusion varie cependant fortement selon les métiers. Dans les fonctions commerciales, deux cadres sur trois déclarent une part variable, dont l’importance peut dépasser 15 % de la rémunération globale. À l’inverse, elle reste minoritaire dans les fonctions support ou techniques, où la part fixe domine largement.

Enfin, dernier levier, très efficace, de revalorisation salariale : la mobilité. En 2025, 70 % des cadres ayant changé de poste en interne ont bénéficié d’une augmentation, un niveau qui surpasse celui des mobilités externes (64 % dans le cas d’un changement d’entreprise sans période de chômage). Le changement de poste reste cependant le moyen le plus sûr et le plus largement accessible, y compris chez les cadres les plus expérimentés. À l’inverse, l’absence de mobilité se traduit par des perspectives réduites : seuls 49 % des cadres restés au même poste ont été augmentés.

*26 000 cadres en poste dans le secteur privé interrogés entre juin 2024 et juin 2025